Collection libre cours, Editions de la Sorbonne, Paris, Novembre 2021
Description
La crise financière en 2008, puis la pandémie de 2020 ont mis au jour la fragilité des acquis de la discipline économique. C’est l’organisation même de la profession qui est en question, car elle a induit faiblesse méthodologique et absence de réflexivité épistémologique. La recherche en économie est ainsi passée d’une quête des fondements théoriques à une myriade d’analyses empiriques, mobilisant les avancées des techniques statistiques et de vastes bases de données. L’institutionnalisation de plus en plus poussée de la profession est porteuse d’incitations qui livrent de remarquables professionnels, spécialistes de la modélisation et de l’analyse statistique, mais peu de chercheurs capables de conceptualiser à nouveau les bases de la discipline. À la lumière d’Émile Durkheim, cette floraison témoigne d’une anomie dans la division du travail chez les économistes. Aussi, d’éminents titulaires du prix d’économie en l’honneur de Nobel ont-ils plaidé pour un retour réflexif sur les conséquences de la hiérarchie des revues, des procédures de recrutement et de la délégation à la bibliométrie du pilotage des orientations stratégiques de la profession. Où sont les agora qui permettraient une confrontation large, rigoureuse et permanente entre programmes de recherche et théories ? Leur création pourrait être le terreau d’une bifurcation de la discipline économique, en particulier de sa réinsertion tant dans les sciences de la nature que dans celles de la société.
Socio-Economic Review , 2021.
Résumé
L’émergence de plates-formes multinationales organisant l’interaction d’une multiplicité d’entreprises et de consommateurs est analysée par l’approche de la théorie de la régulation. La chute de Yahoo! puis l’essor de Google, Amazon, Facebook, Apple et Wikipédia donnent une impulsion sans précédent à la construction de nouvel écosystème porté par un flux constant d’innovations sur l’information. Peut-elle définir une nouvelle configuration dans l’histoire des capitalismes ? Contre l’hypothèse d’un déterminisme technologique, différents types de plateformes peuvent coexister et dessiner des reconfigurations contrastées du monde moderne : un capitalisme de plateformes de marché aux USA, une société de contrôle panoptique en Chine, alors qu’idéalement l’Union européenne vise à convertir l’information en un Commun mondial, surveillé par les citoyens.
Participation au Colloque de l’Institut des Amériques « Un an de Covid-19 dans les Amériques Première table ronde organisé les 27 et 28 avril 2021 par l’Institut des Amériques, l’UMR iGlobes, Mondes Américains (EHESS), l’IHEAL CREDA (Université Sorbonne Nouvelle) et le Campus Condorcet. Discussion : François-Michel Le Tourneau (iGlobes – CNRS). Interventions : – « L’irruption de la Covid-19 dans les Amériques, un an après » par Robert Boyer (CNRS). – « Les formes territoriales de la gestion de la pandémie au Pérou et en Équateur : entre crise organisationnelle et déficit de démocratie » par Fernando Barragan (IAEN Equateur), Maria Teresa Ore (PUCP) et Évelyne Mesclier (IRD). – « La pandémie de Covid-19, un catalyseur des mobilisations sociales au Guatemala ? Une enquête «à distance» entre ruptures et continuités » par Laura Cahier (Aix-Marseille Université) et Garance Robert (Université de Montréal). – « Le vote par correspondance aux États-Unis, nouvelle fracture partisane à l’ère Trump et post-Trump » par Marion Marchet (Sorbonne Université) et Victoria Gonzalez Maltes (EHESS – ENS). Avec la participation de Frédéric Keck (CNRS – LAS).
En collaboration avec François-Michel Le Tourneau, IdeAs [En ligne], 17 | 2021, mis en ligne le 01 mars 2021.
Préface à l’ouvrage Les trente glorieuses au Canada, Gérard Boismenu, Del Busso Éditeur, Novembre 2020.
Les Trente Glorieuses?: c’est l’expression consacrée pour désigner la période qui va de la fin de la Deuxième Guerre mondiale jusqu’au «choc pétrolier» de 1973. Ce sont des années de forte croissance économique pour l’ensemble des pays dits développés, notamment pour les pays dévastés par la guerre, comme la France, l’Allemagne, l’Italie, ou le Japon, mais aussi pour les États-Unis et le Canada. C’est d’abord au sujet de la France qu’on a utilisé l’expression pour mettre en évidence des phénomènes de grands changements, pas seulement économiques, mais aussi sociaux, démographiques et culturels. La situation au Québec et dans l’ensemble du Canada s’inscrit dans le même mouvement, mais bien sûr avec des particularités, qui font aussi ressortir les côtés moins «glorieux» de l’époque.
L’Histoire , n° 475, Septembre 2020.
Pour Robert Boyer, nous ne vivons pas la répétition d’une grande crise du capitalisme comme en 1929, mais une mise à l’épreuve de la capacité des États à répondre à la demande de sécurité sanitaire, économique, et finalement écologique, des citoyens.
L’Histoire : En quoi la crise que nous vivons aujourd’hui se distingue-t-elle des crises du passé ?
Robert Boyer : La grande nouveauté, c’est que la situation actuelle n’est pas le produit des mécanismes internes au capitalisme comme ce fut le cas en 1929, 1973 ou 2008. En 1929, la crise surgit des contradictions d’un régime d’accumulation caractérisé par une production de masse sans consommation de masse. D’où une chute abyssale de la production, avec déflation et paupérisation de la population. En 1973, c’est le modèle fordiste, fondé sur la conjonction d’une production de masse et d’une consommation de masse, qui s’enraye : à partir de 1967, les États-Unis sont touchés par une accélération de l’inflation, une stagnation de la productivité et, par contrecoup, une tension sur les salaires et un décrochage du statut du dollar. Contrairement à 1929, la demande est bien présente, mais c’est la production qui n’arrive pas à suivre. Le …
Editions la découverte, Paris, 1er Octobre 2020.
Annexes : Graphiques, figures et tableaux complémentaires à l’ouvrage, Présentation, Introduction, Chapitre 1, Chapitre 2, Chapitre 3, Chapitre 4, Chapitre 5, Chapitre 6, Chapitre 7, Chapitre 8, Chapitre 9, Conclusion.
Depuis le début de la crise mondiale de la covid-19, les questionnements sur l’avenir des capitalismes se sont multipliés. Et nombre de voix se sont élevées pour que les « jours d’après » ne soient plus jamais comme « ceux d’avant ». Dans le court terme, les pronostics étaient confrontés à une incertitude radicale, invitant à la prudence : il faudra du temps pour démêler l’écheveau des responsabilités et construire d’éventuelles alternatives.
D’où l’importance de comprendre les ressorts de la crise. Comme l’a montré le célèbre 18 Brumaire de Louis Bonaparte de Marx (1852), les meilleures analyses « à chaud » sont le fait d’auteurs ayant une vision de la dynamique du système sur un horizon long. C’est pourquoi Robert Boyer, contributeur majeur de l’École de la régulation – qui étudie l’économie comme partie intégrante de sociétés traversées par l’histoire –, est bien placé pour relever ce défi. Lors de crises précédentes, il a démontré la valeur explicative de cette approche, qui prend en compte à la fois les inerties tendant à la reproduction du système et les forces impulsant sa transformation : l’issue n’est pas écrite à l’avance et plus longtemps durent les crises, plus le retour à la situation antérieure devient improbable.
Dans cet essai, l’auteur donne à comprendre les processus déclenchés en 2020 et éclaire sur le champ des possibles. La dislocation des relations internationales, l’éclatement de la zone euro, la déstabilisation de l’État social, la montée des populismes ne sont pas improbables. Mais n’est pas non plus exclue une grande bifurcation vers un nouveau modèle construit sur la complémentarité entre éducation, formation, santé et culture, qui répondrait à la demande de solidarité des citoyens et aux exigences de la transition écologique.
Présentation PowerPoint au Séminaire Cournot du 16 avril 2020